June 29, 2008

Image(s) de la danse

Comment représenter la danse ? Comment la peinture, le dessin, la sculpture, la photographie ou la vidéo peuvent rendre compte du mouvement inhérent à la danse ? Comment donner à voir l’expression ou le charisme d’un danseur, comment capter l'atmosphère d'un spectacle ? Telles sont les questions auxquelles se propose de répondre l’exposition que La Bibliothèque nationale de France organise à l'Opéra Garnier. L'angle de vue est original, puisqu'il s'agit de retracer les différentes représentations de la danse au cours du temps, à travers une centaine de dessins, estampes, photographies, sculptures et tableaux. Cette exposition permet également à la Bibliothèque nationale de France de mettre en valeur son fonds sur la danse, qui est l’un des plus riches au monde.
Portrait de Germaine-Yvonne Franck
Jean-Gabriel Domergue — ©ADAGP
Le parcours commence au 17e siècle et se poursuit avec les costumes de ballet croqués d’une main leste par Louis-René Boquet au siècle suivant. Dès le début du 19e siècle, la danse acquiert une légitimité qu’elle n’avait jamais eue jusqu’alors. C’est l’explosion du ballet romantique. On voit bien qu’à ce moment, le souci est autant de rendre le mouvement que de coller aux représentations sociales qui l’accompagnent et de restituer les fantasmes qu’elle nourrit. Les danseuses, qui occupent désormais le devant de la scène, sont élevées au rang de mythes. Marie Taglioni la romantique, sa rivale, la sensuelle Fanny Essler, Carlotta Grisi, autant d’interprètes célèbres que de représentations de la danse. L’imagerie populaire n’est pas en reste, qui montre quant à elle l’image d’un statut social encore à part, caricaturé et raillé à propos du physique des danseurs ou de leur prostitution occasionnelle. Le fétichisme autour du pied et du tutu de la danseuse est souligné. Outre des toiles, dont celles de Degas, où l'on voit les danseuses au travail ou au repos, sur scène ou en coulisses, on remarque les nombreuses sculptures de Jean-Auguste Barre ou de Maurice Charpentier-Mio. Preuve que cet art de la matière n’est paradoxalement pas le moins approprié pour rendre le mouvement.
Danseuses s’exerçant au foyer de l’Opéra
Edgar Degas — ©BMO
Mais l’exposition semble inachevée, nous laissant en chemin, en compagnie des travaux photographiques avant-gardistes de Man Ray ou d’Arturo Bragaglia, au début du 20e siècle. Malgré l’évocation des spectacles féériques de l’Américaine Loïe Fuller et de ses affiches dans les années 1900, malgré les allusions aux courants de rénovation de la danse et aux défis techniques qui l’animent, peu de photos de la seconde moitié du 20e siècle, pas de vidéo, pas ou peu de danseurs vivants ; aucune place n'est accordée aux résultats des recherches actuelles en matière de représentation de la danse. Rien ne semble avoir existé après le célèbre saut de Nijinski photographié par Druet si ce ne sont quelques photos saisies au vol, comme celle de Béjart. L'exposition affirme que les possibilités nouvelles offertes par le cinéma et la vidéo n'ont pas affaibli le pouvoir de la photographie dans sa restitution du mouvement : encore fallait-il le démontrer. La période contemporaine est ainsi laissée de côté, ce qui donne en définitive une image assez poussiéreuse de la danse, du même coup peu mise en valeur.

Cette exposition ambitieuse et difficile à mettre en œuvre ne répond malheureusement pas à toutes les questions qu’elle pose. À l’image de sa dernière salle, elle finit en tournant autour de ses intentions.

Du 19 juin 2008 au 11 janvier 2009
Bibliothèque-musée de l’Opéra Palais Garnier
Place de l’Opéra – 75009 Paris
Tél. : +33 (0)1 53 79 37 40
Tous les jours de 10h à 17h, sauf les jours de représentation en matinée.
tarif plein : 8.00 euros
tarif réduit : 4.00 euros
www.bnf.fr