December 22, 2012

Manuel Álvarez Bravo ou la photographie poétique

Le musée du Jeu de paume présente l'œuvre du photographe mexicain Manuel Álvarez Bravo, qui vécut le vingtième siècle dans son intégralité (1902-2002). L'ensemble des photographies, en noir et blanc pour la plupart, illustre bien le propos des commissaires de l'exposition, Laura González Flores et Gerardo Mosquera : la recherche de Manuel Álvarez Bravo vise la photographie en tant qu’art.



Bicicleta al cielo/Bicyclette au ciel, 1931
© Colette Urbajtel/Archivo Manuel Álvarez Bravo, s.c.

Comme en témoignent ses débuts et notamment ses pliages (Ondas de papel / Vagues de papier, 1928), la photographie de Manuel Álvarez Bravo est – et restera – minutieusement construite, tendant vers le constructivisme. Cette caractéristique se retrouve dans sa manière d'aborder le portrait, souvent travaillé (El cuello / Le cou, 1930). Avec les portraits également, on remarque son attirance pour les individus isolés desquels émane une certaine quiétude. Du passage de Manuel Álvarez Bravo au cinéma, on retiendra son emblématique Ouvrier en grève, assassiné (Obrero en huelga, asesinado, 1934). Emblématique mais trompeur si l'on considère ici la violence et l'éventuel engagement politique de l'artiste.



Los agachados/Les Courbés, 1934
© Colette Urbajtel/Archivo Manuel Álvarez Bravo, s.c.

En effet, l'exposition montre que la photographie de Bravo est plus poétique que documentaire. Manuel Álvarez Bravo photographie son pays, et notamment Mexico, mais il n'est pas attiré par le folklore, une quelconque nostalgie ou le témoignage politico-social (Comida corrida / Menu du jour, 1931) Non, comme ses portraits, ses paysages sont patiemment étudiés et surtout paisibles (Qué chiquito es el mundo / Que le monde est petit, 1941). Ainsi, comme la poésie, sa photographie est à la fois très construite et très suggestive. Du reste, Manuel Álvarez Bravo fait directement allusion à un poète, le mexicain Salvador Díaz Mirón, auquel il emprunte un vers (El pájaro canta aunque la rama cruja / L’oiseau chante quoique la branche craque, 1960). Rechercher l’expressivité de la forme, c’est un autre type d’engagement.



Los novios de la falsa luna/Les Amoureux de la fausse lune, 1967
© Colette Urbajtel/Archivo Manuel Álvarez Bravo, s.c.

Mais, alors que l'artiste a travaillé plus de soixante-dix ans, la majorité des photos présentées ont été prises dans les années trente. Pourquoi si peu de photographies de la seconde moitié du siècle dernier nous sont-elles données à voir ? L'exposition ne l'explique pas vraiment.

Le musée expose parallèlement les expériences multimédias de l'espagnol Antoni Muntadas. À voir notamment, avec On translation (1999-), le travail très intéressant de cet artiste sur la traduction et les formes de manipulation qui peuvent découler des processus d'information.


Manuel Álvarez Bravo : un photographe aux aguets (1902-2002)
Muntadas : entre / between
Du 16 octobre 2012 au 20 janvier 2013
Musée du Jeu de paume
1, place de la Concorde
75008 Paris
France
www.jeudepaume.org